Saint-bernard de la Gironde,
les pilotes guides de navigation
Au terme du voyage, l'approche de certaines côtes provoque l'excitation et le soulagement de l'escale imminente, mais parfois, également, l'angoisse des fonds qui remontent, des courants tempétueux, des barres de déferlantes pouvant occasionner, destruction du navire, cargaison endommagée ou perte humaine. Rien de très réjouissant !
Heureusement, la solidarité des gens de mer n'est pas qu'un mythe, et très tôt, certains ont choisi d'aiguiller, au milieu des écueils, les navires sillonnant leurs eaux.
Dans l'estuaire de la Gironde cette pratique semble remonter très loin. Henri II impose et édicte les règles de pilotage en 1551, puis une ordonnance de 1669 définit la réglementation et contrôle les compétences... A cette date, des pêcheurs de Talmont créent la Confrérie des pilotes de la Gironde, première organisation de pilotage locale connue. Les ports de Saint-Palais, Royan et Saint-Georges, accueillent ensuite les chaloupes qui s'y adonnent les premières, puis les fameux dundees ou cotres à tapecul, avec leurs carènes véloces, leurs pavois blancs les distinguant des autres navires, leurs voilures remarquables frappées d'un nombre surmonté des B et X encadrant l'ancre marine...
Les noms des chaloupes l'Etoile, Pauvre-Amélia,... des cotres Vengeur, Gabrielle, Revanche, Padelle,... résonnent encore. Un témoin de cette époque révolue, devrait à nouveau naviguer le long de notre littoral : le Minahouet, côtre aujourd'hui restauré, dont les plans et la construction ont été l'oeuvre d'Augustin Gauraud en 1912, installé sur les rochers de Foncillon.
L'ère bouillonnante des vapeurs ne terrassa pas tout de suite ces fiers destriers nautiques travaillant encore à la concurrence, qui s'éloignaient d'Ouessant jusqu'aux côtes espagnoles pour servir et guider les bateaux désirant entrer dans la rivière de Gironde. Il faudra attendre 1920 pour qu'ils soient relégués au rayon des souvenirs...
Progressivement cette brave corporation va se structurer, en conservant une certaine autonomie. De particuliers, propriétaires de leur outil de travail, elle va devenir syndicat professionnel, composé de co-propriétaires.
La zone d'attente va progressivement se circonscrire au passage de la BXA. Les pilotes patienteront une dizaine de jours durant, à bord d'unités stationnées là, avant d'être acheminés par des canotiers, à la rame puis plus tard au moteur, vers les navires à servir. De cette période on retiendra, dans le désordre, les Commandant Gamas, Kerdonis, Eglefin, Pilote Fleuret et l'Emile Rivière (ces deux derniers, patronymes de pilotes du secteur disparus dans l'exercice de leur métier). Le premier, en compagnie de trois autres marins, le 14 novembre 1875 avec sa chaloupe Soumise aux flots. Le second 90 ans plus tard, en 1965, se noiera avec son canotier Jean-Pierre Johannel, alors qu'il s'apprêtait à servir.
L'Emile Rivière ex-Vierge Marie, ancien chalutier de 50 m reconverti, terminera sa carrière de pilote, en 1985, pour rejoindre la flottille de Greenpeace sous le nom de Rainbow Pacific. La technologie a évolué mais les dangers demeurent, et la liste des victimes s'allonge encore, le 20 novembre 1997, avec le retournement de la vedette Saint Denis, emportant le patron Joël Guyon de Mortagne et son matelot Philippe Dalmasso. Seul un pilote est repêché par l'hélicoptère dont la station du Verdon s'est équipée depuis 1985. Seconde, après Le Havre, à utiliser ce type d'engin, elle est aujourd'hui dotée (depuis 2001), d'un Eurocopter biturbine EC 135 T1, emportant pilote, treuilliste et 3 passagers. Cet équipement ne saurait être complet sans le recours aux pilotines auto-redressables : Orca vedette de mer de 17 m, Mona vedette de rade de 10,80 m construites aux chantiers Bernard prés de Lorient, mais aussi Pyla de 12 m, équipée d'hydrojets, construite en 2005 au chantier CNB. Avec cette panoplie d'outils, les 21 pilotes actuels, installés au Verdon, poursuivent avec dévouement, leur mission de service public, en surveillant aux radars et en guidant les entrées et sorties de notre estuaire, jusqu'à Bordeaux.